Etape 4 Arequipa - Moquego - Terrible fesh fesh
Sur cette étape, c’était hard mais j’étais dans mon élément, j’avais retrouvé du physique et ça allait. Mon gros bleu à la jambe, je l'ai assez vite oublié sur la moto.
L’étape avait mal démarré : avec Hugo Lopes, nous avions confondu l’heure du départ de la spéciale et l’heure de départ de la liaison! Nous sommes donc partis en dernière position, raison du décalage sur le tracking. Hugo, lui, est parti de suite, il faut, selon le règlement, partir avant la 1ère voiture. J’ai dû foncer au bivouac car n’avais pas tout le nécessaire, mais j’ai pointé pour pouvoir repartir sans être disqualifié. Reparti du bivouac, rodéo dans Arequipa, doublé un max de voitures, départ liaison juste derrière Peterhansel, donc tout seul.
Débuté par fesh-fesh (ce phénomène géologique qui rend la surface du sol très volatile, comparé souvent à de la farine et qui est en fait une pellicule de terre qui s'envole au moindre souffle, générant un épais brouillard avec visibilité quasi nulle) présent en puissance 20 par rapport à la veille.
Beaucoup de courbatures musculaires dues à l’étape de la veille (je ne me souviens pas en avoir eu de pareilles !), mais trouvé mon rythme assez rapidement.
Dans la tourmente, je n’avais pas pris mon masque irridium, mais gardé l’écran clair. Bilan : j’ai les yeux brulés par la réverbération alliée à la poussière.
L'étape du jour commencée tôt, avec vite de bonnes sensations - le fameux brouillard généré par le fesh fesh
Km 200 : je m’arrête, j'ai déjà bu mes 2 litres d’eau mais ça va physiquement.
La moto ne redémarre pas. Le fesh-fesh a fait du dégât. Je démonte une à une de nombreuses pièces, pour chaque symptôme potentiellement possible : filtre de connecteur de réservoir, injecteur, pompe immergée, …, fusibles vérifiés, rien ne le fait, elle ne redémarre pas.
Finalement, elle accepte de démarrer à la poussette avec l’aide de locaux et d’une équipe TV7 qui étaient là à ce moment-là et qui ont filmé.
Je suis donc reparti dans la spéciale, roulé pendant +/- 30 km, devais aller jusqu’au CP2 pour ne pas être mis hors course et c’était bon, j’y suis parvenu.
Peu après, entre CP2 et CP3, moteur émet des claquements clac – clac – clac et s’arrête net.
Le problème vient du moteur. Soupapes ? Segmentation cassée anéantissant la compression ? Chaine de distribution ? En tous cas, pas possible de démarrer, à la poussette ou autre. Nouvelles investigations. Malgré les efforts, il faut se rendre à l’évidence : le fesh-fesh a détruit le moteur, malgré la chaussette et le surfiltre du filtre à air, il ne redémarrera pas, il est mort.
Je suis effondré, anéanti.
L’équipe TV7 m’a suivi et m’a retrouvé quand je faisais la mécanique. Ils m’ont passé une tente, j’étais tellement cuit par les efforts et l’émotion (celle-ci, je m’en serais bien passée), que je m’endors.
Au petit matin (12h en France), l’orga est passée avec un 4x4 pick-up, ils m’ont ramené, la moto avec.
Bien après, arrivé au bivouac. Beaucoup d’éclopés et de moteurs en vrac. Cette étape était manifestement conçue pour viser la mécanique, l’altérer, la broyer et éliminer. J’ai aidé pas mal de pilotes. Loïc Minaudier, bien placé dans le classement, a l’orteil en vrac, gonflé, pas possible d’enfiler sa botte, je lui passe la mienne d’1 taille supérieure et ça le fera. Un autre pilote : jambe cassée, etc. … Beaucoup de motos en panne aussi, pour la même raison que la mienne.
Le Dakar continue son travail de sape, cette fois j’en suis, pour la mécanique, pas pour le physique car je suis habitué, je m'y étais préparé et supporte d’être dans le dur et serrer les dents.
Ma femme Magali va me rejoindre ce soir à Arequipa tel que prévu et je sais que sa présence me sera d'un grand réconfort.
Un contact après plusieurs heures sans pouvoir donner de nouvelles, avec les amis, Magali via tél et PC interposés, me font du bien. Les larmes ont un peu coulé aussi pour eux, je pense, vers la Bourgogne, Paris et ailleurs pendant ce live.